* Avant propos : ce témoignage est précieux, car il raconte la naissance dans ce qu’elle a de plus naturel. En publiant ce récit, je ne souhaite pas encourager les accouchements non-assistés. Mais je trouvais intéressant de mettre aussi la lumière sur une situation problématique en France : le manque de SF qui pratiquent les accouchements à domicile et les obstacles qu’elles rencontrent lorsqu’elles osent accompagner ces mamans dans leurs projets de naissance.
Je précise également que la maman qui témoigne s’est extrêmement bien préparée, tant physiquement que psychologiquement pendant 9 mois. Sa grossesse s’est parfaitement bien déroulée. Et elle et son bébé étaient en parfaite santé. Cette maman a pleinement pris la mesure de son choix et s’est entourée en conséquence. Sans oublier la petite dose de chance qui a permis que tout se passe pour le mieux !
Je la remercie pour son partage et j’en profite pour pousser un cri du cœur ! Je souhaite qu’à l’avenir les sages femmes soient vraiment libres d’exercer leur métier en accompagnant des accouchements à domicile. Et j’espère que de nombreuses mamans pourront bénéficier de leurs connaissances, de leur écoute et de leur présence. Nous avons tant besoin d’elles !

Naya est née à la maison, en 3h et sans la présence d’une sage-femme.

J’avais vécu mes deux premiers accouchements dans des maternités parisiennes et avec péridurale. Mais je sentais au fond de moi et dès la première grossesse qu’autre chose était possible.

Nous avons déménagé dans les Alpes et je suis tombée enceinte dans la foulée. Il était clair alors pour moi que j’accoucherai à la maison avec une sage-femme qui pratique les accouchements à domicile. Mais à mon grand étonnement je n’en ai pas trouvé. Je pensais trouver une Doula également, mais là encore je n’ai trouvé personne.

Et cependant je ne suis pas arrivée à me résoudre à accoucher en maternité. Je pensais que je finirai bien par trouver une sage-femme qui soit présente le jour J, et en attendant j’ai commencé à me renseigner sur les accouchements physiologiques. Le premier livre que j’ai lu est celui de Laura Kaplan, Accoucher par soi-même. Ce premier livre a été une réelle source d’inspiration et j’ai commencé par me dire que je serais sans doute capable d’accoucher toute seule. Le bébé est un mammifère aussi, de Michel Odent a été d’un grand soutien. Et puis des témoignages sur YouTube, des conférences de Michel Odent, des conférences sur la douleur de l’accouchement, ses significations, des articles dans la presse étrangère aussi, ont été le fil conducteur de cette préparation à la naissance pas comme les autres.

J’ai appris quantités de choses et avec la connaissance, mes peurs et mes doutes ont commencé à disparaître. Mieux encore, j’étais persuadée que j’étais capable de donner naissance à mon bébé toute seule, et que la présence d’une sage-femme risquait même d’interférer avec ce processus naturel et intime. Je voulais cependant que quelqu’un vienne me guider pour la délivrance du placenta (me dire s’il était décollé par exemple) et vérifie que le bébé aille bien à sa naissance, mais là encore, personne n’a accepté de venir.

Aux derniers examens le bébé était bien positionné et tout allait bien ( pas de strépto B, pas de contractions, pas de saignements, du liquide en assez grande quantité etc…)

Je savais quels signes devraient m’alerter le jour de l’accouchement et dans quels cas nous devrions aller à la maternité.

Je n’ai pas parlé de mon choix de naissance à la maison pour ne pas alerter mes proches. En revanche nous souhaitions la présence de nos meilleurs amis respectifs pour nous épauler et nous soutenir. Avec beaucoup de chance, Naya est arrivée au moment que j’avais plus ou moins prévu et nos amis étaient là.

Je savais aussi que je ne voulais pas que mon compagnon m’assiste et il partageait mon point de vue.C’est donc ma meilleure amie que j’ai réveillé quand les contractions ont commencé à 2h du matin. J’ai très vite senti que le travail avait commencé et que les contractions étaient efficaces. En allant aux toilettes j’ai vu un peu de sang rosé et j’ai su alors que les contractions jouaient sur mon col.

Mon amie s’est mise dans un coin du salon et elle n’a pas bougé. Elle était présente tout simplement et sa présence me rassurait. Il y avait très peu de lumière dans la pièce. Je suis restée sur le ballon tant que j’ai pu. Je faisais des 8 avec mon bassin et sur chaque contraction j’accompagnais mon bébé avec mes mains pour lui permettre de s’engager comme il faut dans mon bassin. Au début j’ai écouté un petit audio de relaxation qui m’a aidé. Tant que j’ai pu je me suis mobilisée sur le ballon ou en marchant dans la pièce en m’arrêtant à chaque contraction. Je me disais que toutes ces contractions me rapprochaient de mon bébé. J’étais si heureuse de la rencontrer bientôt cette petite fille pour qui j’avais voulu une naissance si différente!

Les contractions ont progressé doucement mais sûrement. Je me rappelle avoir dit à mon amie que j’avais peur qu’à un moment donné la douleur me dépasse. Un peu plus tard je lui ai dit aussi que chez moi la phase de désespérance devait arriver plus tôt que chez les autres car je trouvais que c’était déjà intense. Ce que je ne savais pas c’est que j’étais déjà très proche de la naissance de Naya.

J’ai donc changé de position et je me suis retrouvée en grenouille, jambes très écartées, sur le tapis du salon; le ballon devant moi pour soutenir mes bras. J’ai senti à ce moment là que je partais dans un état de conscience modifié. Et là, sans que je m’y attende, je me suis mise à sortir un son très grave sur chaque contraction, un sorte de “Jeeeeeeu” très grave, et au moment du pic de la contraction la “douleur” avait disparu.

Je me suis aussi endormie entre 2 contractions, j’étais vraiment très détendue. Lorsque les contractions ont gagné en intensité j’appelais mon amie et elle me tendait sa main que je serrais très fort. Là je lui ai dit que les contractions n’étaient pas assez rapprochées et pas assez intenses. Ce que je ne savais pas c’est qu’elle les minutait et que non seulement elles étaient très rapprochées mais aussi qu’elles duraient une minute. Je lui ai demandé de réveiller mon compagnon pour qu’il me fasse couler un bain (il a aussi fait chauffer la pièce, a installé des bougies et des petites guirlandes lumineuses)

Quand le bain a été prêt j’ai perdu les eaux sur une contraction. J’étais heureuse et en même temps je me suis dit”allez cocotte courage, tu en as plus que pour 3h, mais sans les eaux tu vas douiller.”

Je me suis levée pour aller dans la salle de bain où j’ai perdu la deuxième poche des eaux. Je suis rentrée dans l’eau qui était délicieusement chaude et cela m’a tout de suite soulagée.

J’ai senti que quelque chose changeait et j’ai eu une grosse envie d’aller à la selle. Je n’ai pas réalisé que si cette envie était là c’est que le bébé était en train d’arriver. J’ai mis ma main sur ma vulve et j’ai réalisé que j’étais complètement ouverte et que la tête de mon bébé était à l’entrée de mon vagin.

Une nouvelle contraction est arrivée et la tête du bébé est sortie. J’ai crié “ça brûle!!” le fameux cercle de feu. J’ai caressé la tête de mon bébé en attendant la prochaine contraction et j’ai aussi vérifié qu’elle n’avait pas le cordon autour du cou. Le reste de son corps est sorti à la contraction suivante, je l’ai attrapé et je l’ai posé contre moi.

Elle n’a pas pleuré, elle a pris une grande inspiration et a plongé ses yeux dans les miens. L’eau était propre, il n’y avait pas de sang, Naya n’avait pas de vernix, sa tête était toute ronde, elle était toute propre. C’était si bon de la sentir contre moi. Elle était enfin là, sa naissance avait été encore plus belle que celle que j’avais rêvé et imaginé. Je l’avais fait!! Après tous ces mois d’attente et de préparation, j’avais donné naissance à mon bébé toute seule.

Je l’ai rapidement mise au sein et nous avons attendu que le cordon cesse de battre. Nous avons trempé de la ficelle dans de la teinture mère de Calendula, nous avons fait un nœud et j’ai coupé le cordon. Juste avant de le couper j’ai tenu à dire les mots suivants : “En même temps que ce cordon, je coupe toutes les charges négatives de ta lignée, les peurs, les culpabilités, ainsi que les miennes. Nous sommes séparées de corps mais nous resterons toujours unies. Va Naya, vis. Bienvenue au monde mon amour.”

C’était très émouvant. Nous sommes restées dans l’eau 1h et puis je me suis levée pour aller dans ma chambre. Mon utérus contractait bien mais le placenta n’était pas sorti. J’ai donc décidé d’aller à la maternité avec les pompiers pour la délivrance du placenta. Une fois à la maternité on m’a dit que le placenta était décollé, mais mon col s’était refermé. Il m’a suffit de pousser 2 fois pour qu’il sorte.

Je n’ai pas avoué aux médecins que j’avais accouché par choix à la maison, je leur ai dit que tout était allé trop vite et malgré cela, une sage-femme a appelé la pmi afin que je subisse une enquête de proximité. La pédiatre m’a traitée de folle dangereuse mais nous a laissé sortir 2h plus tard, sans me donner le carnet de santé de Naya pour être certaine que je reviendrai 2 jours plus tard pour vérifier que tout allait bien et qu’elle n’aurait pas la jaunisse comme ses aînés (à ce jour toujours pas de jaunisse pour Naya qui a 3 mois).

L’accouchement a duré 3h, elle est née 5mn après que j’ai perdu les eaux. J’ai imaginé la naissance de Naya, visualisé et préparé chaque étape de ce processus naturel et le jour J j’étais prête. Je savais qu’il n’y avait pas d’endroit plus sûr que la chaleur de mon foyer pour mettre au monde mon bébé. Parce qu’il y avait peu de monde autour de moi, qu’il y avait très peu de lumière, qu’il faisait chaud, que ça sentait bon les odeurs que je connaissais, que j’étais libre de mes mouvements et qu’ainsi j’ai pu trouver naturellement les positions antalgiques qui m’ont soulagée.

Je n’ai pas subi de touché vaginal, et je n’ai pas poussé. Mon corps a expulsé mon bébé tout seul car je lui ai donné les moyens de faire ce pour quoi il est fait. J’ai été en présence avec mon bébé pendant toute la naissance et je savais qu’elle savait très bien comment naître. Il n’y a eu ni stress, ni peur, ni doute.

J’attendais d’avoir mal comme j’avais eu mal lors de mes 2 premiers accouchements en hôpital et sous péridurale. Nous avons toutes un besoin viscéral de nous relier à notre féminin sacré, c’est dans l’air du temps et ce n’est pas un hasard. On nous a trop longtemps coupé de notre nature profonde. Mais on peut se réapproprier nos corps, décider comment accoucher et ne pas subir. Et vivre ses moments dans la joie et dans la douceur. Pour nous et nos bébés, c’est important!